2ème Sortie annuelle le vendredi 1.10.2021 : Musée suisse de l’orgue à Roche, Vaud et l’Abbaye de Saint-Maurice, Valais

Le Musée suisse de l’orgue à Roche /Vaud
Un monument unique en son genre

Le bâtiment du Musée – la Grange-Relais – faisait partie d’un ancien relais routier édifié au XIème siècle par les chanoines augustins du Grand-Saint-Bernard sur la plus ancienne route romaine de Suisse qu’empruntaient les pèlerins au départ de Roche par la Bâtiaz près de Martigny, Orsières, Bourg-Saint-Pierre pour arriver au col du Grand-Saint-Bernard, accueillis par les chanoines et leurs fameux chiens. En hiver, les chevaux redescendaient au relais central de Roche qui comprenait (en 1177) plusieurs édifices dont l’église Saint-Jacques, une maison forte, un hôpital et le « Relais des pèlerins ». Ce dernier vestige devenu, au 18ème siècle, une grange à fourrages ainsi qu’une vaste écurie a bien failli subir, comme les autres immeubles disparus, la démolition. En 1970, la ruine, achetée par la Commune, ne dut sa survie qu’à une indisponibilité de l’armée suisse qui manquait de dynamite pour la faire sauter…

Aujourd’hui, classée monument historique, cette Grange-Relais est l’une des plus anciennes de son genre en Suisse. Donné par la Commune de Roche à la Fondation du Musée suisse de l’orgue, cet immeuble a permis de devenir le domaine de l’instrument Roi, Musée dont la destinée débuta modestement dans une grange similaire à Essertes (Haute-Broye vaudoise).

L’orgue, instrument musical et architectural n’échappe pas à une élimination au cours des âges. En Suisse romande, seuls quelques vestiges furent sauvegardés, initialement à Essertes dès 1969, point de départ du seul Musée en Suisse consacré à l’histoire et à la technique de l’instrument Roi. On en trouve deux en Allemagne et un en Hollande. D’autres seraient en gestation.

Au départ de cette aventure on trouve en 1947, un passionné Monsieur
Jean-Jacques GRAMM de Lausanne qui se sent appelé à faire connaître au grand public le fruit de ses recherches autour de l’instrument dont il avait retrouvé divers vestiges en des lieux très inattendus, dont des « décharges » où l’on jetait sans remords restes ou documents de grande valeur.

Le fondateur du Musée s’entoura par quelques amis qui constituèrent en 1974, le premier comité de l’Association des Amis. Une assise encore plus solide fut la création en 1979 de la Fondation du Musée suisse de l’orgue, fondation privée. Le conservateur réside à Roche dans l’immeuble du Musée et le secrétariat est assuré à Pully, Vaud.

Ce n’est qu’au 9ème siècle, sous la pression des moines d’Orient, que l’orgue (libertin, profane, coquin…) entra à l’église avec les réticences que l’on peut imaginer !… Il connut sa dernière popularité dans les salles obscures à la fin du 20ème siècle.

C’est ainsi qu’un soin tout particulier a été apporté à l’aspect didactique de l’exposition qui s’étend des ancêtres de l’orgue (flûte de pan, sho japonais, cornemuse) et s’arrête à l’invention de la « machine orgue » réalisée deux siècles et demi avant l’ère chrétienne par le mécanicien grec Ktésibios à Alexandrie. De multiples exemples détaillent les différentes composantes de l’orgue, telles que nous les connaissant, avec tuyaux sonores, clavier, mécanisme et soufflerie.

Une commission travaille actuellement à un concept global d’exploitation complémentaire des bâtiments ce qui permet de rêver de secrétariat, locaux d’exposition, salle de conférences et de concert.

Le Musée est ouvert sur rendez-vous du 1er mai au 31 octobre tous les jours sauf le dimanche matin et le lundi.
Le samedi visite guidée individuelle sans rendez-vous.
Horaire des visites guidées. Départ à 10h 15, 14h 15 et 15h 45 (durée 1h15)
Réservations par éléphone : 021 960 46 57 – fax : 021 960 46 58
Internet : www.orgue.ch / e-mail : secrétariat@orgue.ch

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L’Abbaye de Saint-Maurice est une abbaye territoriale située dans le canton du Valais en Suisse. Elle a été fondée en 515 par le roi burgonde Saint Sigismond à l’emplacement d’un sanctuaire plus ancien abritant les reliques de Maurice d’Agaune, martyr de la légion thébaine au IIIe siècle, érigé par Théodore d’Octodure (fin du IVe siècle), premier évêque connu du Valais. Cette fondation en fait le plus ancien établissement monastique d’Occident chrétien toujours en activité, ayant été occupé en permanence. Situé sur la Via Francigena, voie de pèlerinage qui mène au tombeau de Saint Pierre à Rome, l’abbaye fait partie des plus importants monastères créés au nord des Alpes durant le haut Moyen Âge.

L’abbaye a joué un rôle majeur dans l’histoire régionale plus loin en Occident. Le premier roi de Bourgogne transjurane, Rodolphe, y fut couronné.

Originellement et jusqu’au IXe siècle, c’est la laus perennis qui s’appliquait. Les moines furent alors remplacés par des chanoines qui adoptèrent la règle de Saint Augustin en 1128. C’est, depuis cette date, la congrégation des chanoines réguliers de Saint-Maurice d’Agaune qui est en place dans l’abbaye.

Sommaire

En raison de l’importance prise par l’établissement religieux établi en 515 en ce lieu, celui-ci a pris progressivement le nom de Saint-Maurice (première attestation en 1003).

Selon d’autres sources, la localité se serait nommée à l’origine Tarnade, nom d’un château proche dit Castrum Tauredunense par Marius d’Avenches (qui vécut au VIe siècle). Cet édifice aurait été enseveli par l’éboulement du Mont Taurus en 562 ou 563. En 385 elle prend le nom d’Agaune sur la décision de saint Ambroise lorsqu’il passe par cette localité située sur le trajet de son voyage à Trèves, Agôn désignant la victime que les empereurs immolaient avant d’entreprendre une expédition, à l’exemple de Saint Jérome qui parle d’« agones martyrum » pour désigner les combats des martyrs.

1.1. Le temple romain d’Hygie
L’emplacement de l’abbaye fut un lieu consacré dès au moins l’époque romaine. Un autel romain dédié aux nymphes y a été retrouvé à côté de la source elle aussi consacrée aux nymphes. La tradition locale raconte que l’ancienne chapelle de saint Jean l’Évangéliste, qui deviendra l’église de Maurice d’Agaune, était bâtie sur un ancien temple dédié à la déesse Hygie. Toujours est-il que ce lieu sacré restera interdit d’habitations civiles jusqu’au XIe siècle (« Ut de loco quem morte Theboei martyres et effusione sanguinis… ornaverant, promiscui vulgi habitatio commista tolleretur… Igitur visum est ut remotis familiis secularibus… ») ; à cette époque le bourg de Saint-Maurice (« burgum sancti Mauritii ») et l’hôpital Saint-Jacques (« Dedit Sancto Mauritio ad hospital ») se développèrent dans un enclos fermé de murailles séparé du monastère par des terrains cultivés comme il est décrit dans des chartes de 1003 et 1046 (« Casale unum in burgo Sancti Mauritii » pour l’un, « mansum unum in Agauno loco in plano » pour l’autre). La réunion du bourg et du monastère ne débute qu’à partir de 1018, avec les restitutions de Rodolphe III, pour être définitive en 1163 lors de l’acquisition par l’abbaye de tous les droits ecclésiastiques des évêques de Sion.

1.2. La légende du massacre de la légion thébaine
La légende5 situe entre 285 et 306 le massacre de la légion thébaine et de ses officiers, tous chrétiens, ordonné par Maximien, empereur romain, au motif qu’ils avaient refusé d’exterminer des chrétiens. Cette légende est relatée en premier lieu dans l’histoire de Victor de Marseille écrite à la fin du IVe siècle, puis reprise par saint Eucher, évêque de Lyon vers 435, qui la raconte à l’évêque de Sion Salvius, elle est contée dans l’ouvrage relatant la vie de Romain de Condat et enfin elle est reprise dans l’homélie que saint Avit prononce en 515 à l’occasion de l’inauguration de l’abbaye. Selon Amédée Thierry (Histoire de la Gaule sous la domination romaine) cette légion pourrait avoir été formée avec plusieurs corps des armées d’Orient sans emploi et entre autres la XXIIe légion, il signale que cette légion nommée « Heureuse » était cantonnée à Thèbes avant d’être transférée à Jérusalem, que trois de ses principaux officiers étaient Mauricius, Exupérius et Candidus, convertis par l’évêque Hyménée, et qu’arrivés à Rome ils s’engagèrent auprès du pape Caïus à ne pas persécuter les chrétiens ; pour Ch. Robert il s’agit de la « Ire Maximiana Thebæorum » et de la « IIIe Diocletiana Thebæorum ». Ces deux légions sont la création de Maximien et Dioclétien lors de leurs campagnes en Afrique du Nord, en effet après avoir soumis les villes de Coptos et de Bousiris, en Égypte ils incorporèrent leurs jeunes hommes dans trois légions : la « Ire Jovia Fœlix Thebæorum », la « Ire Maximiana Thebæorum » et la « IIIe Diocletiana Thebæorum ». C’est Théodore d’Octodure (dit aussi Théodule), premier évêque du Valais à la fin du IVe siècle siégeant à Martigny anciennement Octodurus, qui créa le premier sanctuaire chrétien en 381 en y transférant les restes des martyrs dans une chapelle attribuée à Maurice et ses compagnons massacrés. Ce sanctuaire a été agrandi au IVe siècle.

Vers la fin du Ve siècle une église existe donc déjà sur le site et Saint Severin (430-507), parle même d’un monastère dont il fut l’un des premiers abbés.

1.3.L’édification par Saint Sigismond
Au début du VIe siècle Sigismond, fils de Gondebaud, roi burgonde qui l’initie au pouvoir et le fait reconnaître comme son successeur à une assemblée tenue près de Genève, abjure l’arianisme pour se convertir au catholicisme entre 502 et 506 sous l’influence d’Avit, évêque de Vienne, et entreprend de construire à Agaune, ou Saint-Maurice en Valais du diocèse de Sion, une église. Alors que son père Gondebaud restait fidèle à l’arianisme, Sigismond embrasse l’orthodoxie catholique (pas de distinction à l’époque) et fait de l’abbaye, dès son accession au trône en 516, un lieu de pèlerinage pour son peuple qui a dû le suivre dans sa foi. Sa position sur la route du col du Grand-Saint-Bernard qu’empruntent les pèlerins de Rome ou les commerçants voyageant entre l’Europe du Nord et l’Italie renforcent son attractivité et son prestige. La première basilique, orientée estouest, au pied du rocher, date de cette époque, ainsi que le baptistère, permettant de procéder selon le rite de l’immersion partielle, qui peut être encore visité. Avant de monter sur le trône burgonde il consulte les évêques et les comtes de son royaume assemblés à Agaune, il y a là les évêques Viventiolus, Maximus, Victor et les comtes Videmarus, Fredebundus, Gondeulfus, Benedictus, Agano, Bonefacius, Teudemundus et Fredeboldus. Le roi ouvre la séance en demandant conseil pour le salut de son âme et pour l’exécution de ses projets favorisant la prospérité de son royaume. Les participants en viennent à proposer de construire une basilique où ensevelir les corps des martyrs connus qui sont Maurice, Exupère, Candide et Victor (bien qu’il semble avoir échappé au massacre) ainsi qu’une crypte pour les autres corps ; il propose également de constituer une garde, d’établir une psalmodie perpétuelle (des chœurs de moines s’y relayaient jour et nuit afin d’assurer une prière continue) et d’instituer pour abbé Hymnemond venu pour cela du monastère de Grigny. Il réunit aux moines préexistants des religieux venant de « Granensis » (Grigny), d’« Insolana » (île Barbe) et de « Jurensis » (Condat). Le 22 septembre 515 elle est inaugurée en présence d’un grand nombre d’évêques, de comtes et de grands seigneurs (parmi lesquels se trouve saint Viventiole de Lyon, Maxime de Genève, Théodore de Sion et Victor de Grenoble), l’assemblée devait durer seize jours afin de finaliser le règlement du monastère.

Sigismond, devenu veuf, se remarie à Constance (qui serait la servante de sa défunte épouse), celle-ci lui donne deux fils Gistald et Gondebald. Le premier fils de Sigismond, Ségéric, après une violente dispute avec sa belle-mère et celle-ci craignant pour l’avenir de ses propres enfants, trouvera la mort par la propre main de son père. Pris de remords le monarque part s’enfermer au monastère d’Agaune pour expier son meurtre. Plus tard, pris et livré avec son épouse et ses deux fils à Clodomir, roi des Francs, ils sont décapités et jetés dans un puits à Saint-Sigismond du Loiret.

Dès le VIe siècle, l’abbaye entretient 500 religieux divisés en cinq « bandes » se succédant pour la psalmodie perpétuelle, ces « bandes » se nommant « Lérins », « Grigny », « l’Isle-Barbe », « Jura » et « Domni Probi » (cette dernière est formée par les anciens moines d’Agaune3). Durant les trois siècles suivants, le monastère vit une période faste et 32 abbés se succédèrent à sa tête. Sigismond va la doter de biens considérables afin de permettre aux religieux de se consacrer à leur psalmodie, il lui donna des biens dans ses territoires de Lyon, de Vienne, de Grenoble, de Genève, de Vaud, de Besançon et d’Aoste ; en Valais, elle reçut Sierre, Loèche, Conthey, Bramois, Ollon, Vouvry, Autan, Salvan et Autanelle en plus des terres qui s’étendaient à partir du lac de Martigny avec tout ce qui en dépendait en terres, édifices, esclaves, affranchis, habitants, vignes, forêts, champs, prés, pâturages, droit de pêche…

Les premiers siècles de vie de l’abbaye vont lui faire connaître plusieurs grandes catastrophes, en 569 ce sont les Lombards, peuple germanique venu de la mer Baltique, qui envahissent le Valais et incendient l’abbaye ; Gontran, roi de Burgondie, se chargera de la rebâtir. Sous l’Empire carolingien ce sont les Sarrasins qui vont se répandre dans le royaume et se livrer, entre autres, au pillage du monastère. Ainsi l’annaliste Flodoard précise pour l’année 940, que le village du monastère de Saint-Maurice était en la possession des Sarrasins et que ces derniers en profitaient pour attaquer les voyageurs et pèlerins.

Le nombre de moines a peu à peu diminué aux VIIe et VIIIe siècles et ceux-ci deviennent des chanoines séculiers. À la suite d’éboulements, la basilique est reconstruite aux VIIIe et XIe siècles, toujours dans le sens est-ouest.

1.4. Résidence royale sous le régime de la commende
Acte de donation du roi de Bourgogne Rodolphe III à l’abbaye de Saint-Maurice (15 février 1018).

À partir de 825 Louis le Débonnaire, qui avait reçu l’abbaye des mains de son père, la donne en commende à son fils Arnulf ce qui amorce son déclin. Voyant les exactions commises Louis entreprend, sans résultats, d’y placer des chanoines séculiers, qui sont des clercs formant un chapitre de chanoines sous l’autorité d’un prévôt, mais restant propriétaires de leurs biens. Au milieu du IXe siècle, Hucbert, beau-frère de l’empereur Lothaire II, s’empare de l’abbaye. De 864 à 1032, l’abbaye échappe à l’influence de l’évêque de Sion pour devenir un abbatiat laïc.

Tué en 864 dans une bataille à Orbe, Hucbert est remplacé à la tête de l’abbaye par son vainqueur, Conrad, comte d’Auxerre. L’abbaye est dévastée par l’incursion des Sarrasins en 940.

La descendance du comte Conrad, soit les rois de Bourgogne, de Rodolphe Ier à Rodolphe III, dirigent l’institution en tant qu’abbés laïcs jusque vers l’an mille. Ils font de celle-ci une résidence royale et confondent ses biens avec ceux de la couronne. Les conditions vont s’améliorer avec Rodolphe III, dernier roi de Bourgogne, qui décide une restitution complète des biens au monastère6. Le 15 février 1018, à la demande de ses familiers, Rodolphe III, donne ou plutôt rend à l’abbaye de Saint-Maurice les fiscs de Sciez, de Lully, de Commugny, la moitié de Pully, Oron-le-Châtel, la pauté de Vuadens, Bouloz, le plaid de Vevey, Lutry, Vouvry, Ollon, Villy, Naters, quelques droits à Saint-Maurice et l’ensemble des alpages du Chablais. Mais c’est surtout grâce au pape Léon IX qui en 1049 la soustrait à l’évêque de Sion et rend aux religieux l’usage de leurs biens et revenus en leur permettant d’élire entre eux un abbé qui jusqu’alors était choisi parmi les personnages en faveur à la cour qui en permet le renouveau, l’abbaye retourne ainsi entre des mains ecclésiastiques.

Longtemps entre les mains des monarques du royaume de Bourgogne elle échoit à la maison de Savoie en 1033 après la victoire du comte Humbert sur Eudes, neveu de Rodolphe III. En 1128, le comte Amédée III, qui en est l’abbé laïc (11031147), aide à la renaissance de l’abbaye de Saint-Maurice en y installant des chanoines réguliers suivant la règle de Saint Augustin6. Selon la tradition, il finance sa participation à la deuxième croisade en 1147 grâce à un prêt de l’abbaye pour lequel il met en gage les vallées de Bagnes et de Vollèges (la légende dit qu’il s’agit d’une table d’or qui avait été donnée par Charlemagne au monastère)13. L’Avouerie qui est entre les mains de la famille d’Allinge et qui a fait leur fortune passe à la fin du XIIe siècle18 aux comtes de Savoie.

Un important atelier d’orfèvrerie romane semble y avoir été tenu aux XIIe et XIIIe siècles, comme le suggère le démontage du chef-reliquaire de Candide en 1961 pour le restaurer et pour lui remodeler le nez.

La règle de Saint-Augustin n’est plus suivie de manière stricte à Saint-Maurice dès le XIVe siècle. Les biens ne sont plus mis en commun : les différents chanoines (sacristain, chantre, infirmier) s’attribuent des prébendes distinctes. En 1475, l’Abbaye, avec le sud du Bas-Valais, passe en main de la principauté épiscopale de Sion et des dizains valaisans après leur victoire contre les savoyards à la bataille de la Planta.

En 1560 l’abbaye est détruite par un grand incendie suivi, cinquante ans plus tard, d’un énorme éboulement à la suite d’un tremblement de terre. À la suite d’un nouvel éboulement, la basilique doit être reconstruite au milieu du XVIIe siècle, en suivant l’orientation nordsud cette fois-ci et un peu plus éloignée du rocher. Placée sous l’autorité de l’évêque de Sion et de la diète valaisane, l’abbaye a perdu une grande partie de ses biens et de son prestige. En pleine décadence matérielle et spirituelle, l’abbé Pierre IV (Maurice Odet, abbé de 1640 à 1657) supprime le système des prébendes et rétablit la règle augustine, notamment le vœu de pauvreté, permettant à la vie commune de reprendre 10 septembre 1642.

Pour réformer l’abbaye, une brève tentative d’union à la congrégation de Notre-Sauveur (fondée par Pierre Fourier) a lieu entre 1672 et 1675. Saint-Maurice serait devenue le centre de cette congrégation d’origine lorraine, avec qui l’abbaye est en contact depuis 1636. C’est un échec et les chanoines lorrains, perçus comme des étrangers, quittent l’abbaye pour se replier en Lorraine et au Val d’Aoste à la fin du XVIIe siècle.

Le 23 février 1693, un incendie qui se déclare dans les cuisines de l’abbaye détruit presque complètement les bâtiments abbatiaux (à l’exception de la basilique) qui sont définitivement reconstruits à partir de 1706.

L’abbaye échappe en partie au mouvement de sécularisation et de dispersion des religieux initié par la Révolution française en relevant l’ancien collège religieux fondé par la communauté que le gouvernement savoisien avait supprimé en 1560 par suite de la jalousie de la diète valaisienne.

En 1942, un nouvel éboulement détruit à nouveau une partie de l’église et le clocher. Ces bâtiments furent restaurés après la guerre et l’église obtint le titre de basilique mineure en 1948.

En 2013, des fouilles ont été menées sur le site de l’Abbaye de Saint-Maurice par l’archéologue valaisanne Alessandra Antonini5. Le trésor de l’abbaye et les fouilles peuvent être visités.

2. Liste des abbés de Saint-Maurice
Article détaillé : Liste des abbés de Saint-Maurice d’Agaune.

La liste des abbés de Saint-Maurice débute avec Saint Séverin († 511). De la seconde moitié du IXe siècle jusqu’à la première moitié du XIIe siècle, la gouvernance du monastère se trouve entre les mains des laïcs, successivement les Rodolphiens, puis les Humbertiens. À partir de 1128, et la réforme de l’abbaye par l’évêque de Grenoble, Hugues Ier, les abbés dirigent à nouveau les lieux.

3. Organisation
L’abbaye ne fut jamais dépendante d’un diocèse et d’un évêque, car elle bénéficia dès sa fondation de l’immédiateté pontificale, c’est-à-dire qu’elle dépend directement du Pape et de lui seul. Après avoir été un nullius diocesis, elle devient « abbaye territoriale ». Ce qui veut dire que l’abbé de Saint-Maurice exerce sa propre juridiction spirituelle sur sa communauté abbatiale ainsi que sur les paroisses de son territoire.

Congrégation canoniale autonome donc, l’abbaye a compté jusqu’à plus de 120 religieux au cours du XXe siècle. Leur nombre n’a cessé de décroître depuis. En 2013, l’abbaye ne compte plus que 41 religieux, dont 36 chanoines.

Ces derniers sont des prêtres vivant sous la règle de saint Augustin. Tous ne résident pas à l’abbaye ; certains habitent à l’extérieur, dans une paroisse du territoire, dans une paroisse du diocèse de Sion ou alors à l’extérieur pour assumer d’autres charges pastorales. Les chanoines desservent en effet plusieurs paroisses du diocèse de Sion, prêtant main-forte à ce dernier.

Les paroisses du territoire abbatial sont au nombre de cinq :

  • la basilique abbatiale, érigée en paroisse, comprenant l’abbaye, la basilique, le collège, la chapelle de Vérolliez et le home Saint-Jacques (résidence pour personnes âgées) ;
  • la paroisse de Saint-Maurice et Mex, comprenant la chapelle de Notre-Dame-du-Scex ;
  • la paroisse de Vernayaz ;
  • la paroisse de Salvan ;
  • la paroisse de Finhaut.

Ces paroisses regroupent 6 087 catholiques en 2013.

4. Collège
Article détaillé : Lycée-collège de l’Abbaye de Saint-Maurice.
L’abbaye de Saint-Maurice possède un collège ayant un statut d’établissement semi privé car il est propriété des chanoines mais est régi par un concordat de 1806 entre l’abbaye et l’État du Valais. En 1806 en effet, le Valais reconnaît le collège en tant qu’établissement d’utilité publique et participe à son financement. Aujourd’hui encore, les chanoines dirigent l’établissement et deux d’entre eux y enseignent, à savoir le chanoine Ineichen (également recteur) ainsi que le chanoine Salina (également préfet de l’internat).

5. Basilique
Article détaillé : Abbatiale Saint-Maurice d’Agaune.
L’église abbatiale a été reconstruite selon une nouvelle orientation au XVIIe siècle et restaurée par l’architecte Claude Jaccottet après un effondrement en 1942. Église mère du Territoire abbatial, l’abbatiale est élevée au rang de basilique mineure le 30 novembre 1948 par le Pape Pie XII.

6. Le trésor de l’Abbaye

Parmi les nombreuses pièces exposées, il convient de noter quelques éléments exceptionnels :

  • la châsse de l’abbé Nantelme, datant de 1225 ;
  • la châsse des enfants de Saint Sigismond, datant du XIIe siècle ;
  • la grande châsse de Saint Maurice, datant du XIIIe siècle;
  • le reliquaire de la Sainte Épine, offert par Louis IX de France ;
  • le coffret de Teudéric, Mérovingien, datant du VIIe siècle ;
  • le vase dit de Saint-Martin de Sardonyx, qui daterait du Ier siècle et qui est rehaussé d’orfèvrerie carolingienne. Il aurait recueilli selon la légende le sang des martyrs de Thèbes et fait probablement partie des donations du roi Sigismond lors de la fondation de l’abbaye ;
  • l’aiguière dite de Charlemagne, d’époque carolingienne, aux émaux byzantins ;
  • le chef-reliquaire de Saint Candide, datant des environs de 1165.